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147 - Le Guetteur

( D'après «Le Voyageur Contemplant Une Mer de Nuages» 1818 - Caspar David Friedrich) 

«Le Voyageur Contemplant Une Mer de Nuages»

Selon cet ordre d’idée, CDF peint en 1818 Le voyageur contemplant une mer de nuages. L’homme au premier plan se dresse sur un haut rocher au-dessus des nuages, et scrute l’horizon de ce paysage imaginaire et symbolique, semblable à une mer hérissée de récifs dangereux. Du sommet de sa montagne, et donc de son existence, il contemple le chemin qu’emprunte le défunt partant à la rencontre de Dieu. Les rochers qui se dressent devant lui symbolisent ici la foi chrétienne : pour rejoindre Dieu, il devra traverser cette étendue et connaître différentes épreuves. 

Car selon Friedrich, rencontrer Dieu se mérite, et constitue de fait une quête perpétuelle autant qu’universelle : cet homme peut être n’importe quel homme, puisque présenté seul, de dos, sans visage. Le regardeur peut s’y identifier, profiter grâce à sa position légèrement en retrait du même point de vue, et de fait, ressentir les émotions de sa contemplation. L’aspect “divin” du tableau tient dans sa capacité à créer une profondeur quasi-irréelle, synthèse de toutes les techniques connues. 

La construction est verticale, comme une ascension. Les tailles diminuent progressivement en fonction de la distance. Friedrich utilise une alternance de plans clairs/obscurs : les plans sombres des monts sont entrecoupés par des plans lumineux de nuages d’où ils semblent surgir ; composition qui, une nouvelle fois, évoque les estampes traditionnelles chinoises, faîtes de vide et de plein. Il n’y a pas vraiment de superposition des plans, les uns derrières les autres, mais plutôt une succession, les uns à la suite des autres. 

Au loin, les formes deviennent de plus en plus floues, se dissolvent et s’éclaircissent d’une teinte bleutée. Friedrich utilise ici la technique de la perspective atmosphérique, dérivée de celle mise au point par Léonard de Vinci à la fin du 15ème siècle : le sfumato (qui signifie évanescent, dérivé de l’italien fumo, la fumée). Elle consistait à adoucir progressivement les formes souhaitées lointaines sur la peinture, tout en les teintant progressivement de bleu, couleur de l’atmosphère. 

Les formes finissent par se perdre et se confondent avec le ciel. Bien qu’il n’y ait pas vraiment de perspective, un point de fuite semble paradoxalement se dessiner sur l’homme, alors même qu’il est au premier plan (le point de fuite est habituellement le point le plus éloigné de nous). Placé au centre du tableau, au croisement de ses diagonales, deux plateaux montagneux semblent en effet également se diriger avec précipitation vers lui. Moyen pour Friedrich de rappeler que l’homme reste au centre des préoccupations du romantisme, et que sa quête spirituelle est aussi intérieure qu’extérieure.