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13 - La voix du Nord

 

- 3 - La Fusion

Environs de Barlin 62, (d'après Magritte)

"La condition humaine" 1935

 

 En 1935, René Magritte peint une toile énigmatique. 

Dans cette toile, il y représente un tableau devant une fenêtre, sur lequel est peint le paysage que l’on voit à la fenêtre. Le tableau de la toile représente ce qui se trouve au delà. On ne repère pas immédiatement ce qu’il s’y passe, il faut un petit moment pour comprendre que devant la fenêtre, il y a un tableau. 

A vrai dire, c’est le chevalet et le léger empiétement du cadre du tableau sur le rideau qui borde la fenêtre qui nous indiquent que la vue extérieure est cachée. On s’interroge, un moment de perplexité, puis l’œil parle : « Mais, qu’y a-t-il vraiment derrière si l’on pousse le tableau de la toile ? » et de constater que l’on y perd rien, puisque ce qui est derrière est là, sur le tableau représenté.. 

Mais de nouveau un doute s’immisce : car un tableau ne peut représenter un mouvement en direct, il se pourrait que derrière s’y trouve un « être » en mouvement qui ne saurait y avoir été représenté... En fait de question de mouvement, l’œil est frustré par la fixité du tableau dans la toile. Et il est pris. Pris dans l’illusion qu’il pourrait y avoir derrière la fixité du tableau un mouvement ; et l’œil se surprend de sa propre cénesthésie à s’élancer sur le coté du tableau pour voir… au-delà. 

Mais à vouloir pousser ce tableau, c’est dans le leurre que le spectateur s’aliène. C’est que Magritte a représenté, dans sa toile, un tableau qui prétend y montrer ce qu’il cache. Et le spectateur, saisi par l’impossible et par la pulsion scopique, en oublie que c’est un tableau qu’il regarde. Cette toile, c’est à la fois un leurre - le tableau de la toile qui prétend présentifier l’absence de la Chose - et un trompe l’œil - lorsque l’œil s’exclame : « mais comment savoir si ce tableau représente ce qu’il cache ? » Cette toile est aussi un trompe l’œil car s’il est à jamais impossible au spectateur de voir derrière le tableau ; il lui reste néanmoins, en tant que sujet, possible de se questionner et d’imaginer - s’il s’affranchit de la fixité illusoire du symptôme - un au-delà au tableau.